Les dispositifs concentrateurs de poissons ancrés peuvent-ils permettre une exploitation durable des ressources ?

Les dispositifs concentrateurs de poissons (DCP) ancrés ont connu un fort développement aux Antilles à partir du milieu des années 1990. En favorisant le regroupement de grands poissons pélagiques, ces outils ont permis aux petits navires de pêche d’exploiter des espèces jusque-là peu capturées en Martinique. Le projet Magdelesa, réalisé en collaboration avec plusieurs pays caribéens, a étudié les conditions permettant une exploitation durable des ressources à l’aide des DCP.

Le projet MAGDELESA (Moored fish aggregating device in the Lesser Antilles) a pour objectif de réduire la capture des poissons côtiers, surexploités, en redirigeant les efforts de pêche sur les poissons pélagiques de haute mer, au moyen de dispositifs concentrateurs de poissons ancrés pour parvenir à une exploitation durable de ces poissons.
Le projet s’est divisé en plusieurs actions :

  • Élaboration d’outils d'aide à la conception des DCP, afin de réduire leurs coûts de construction, augmenter leur durée de vie et limiter les débris en mer.
  • Étude de la biologie des espèces pêchées et des techniques de pêche, en cherchant celles permettant de réduire le taux de capture des espèces trop exploitées et des juvéniles.
  • Travaux socio-économiques, notamment sur les coûts liés aux DCP et les revenus de la pêche, pouvant expliquer les stratégies des pêcheurs.
  • Analyse de la gouvernance des parcs de DCP par les pêcheurs et par les institutions.
  • Analyse des causes de dégradation de la qualité des poissons pêchés : taux de contamination par des parasites ou des polluants, mode de conservation dans les bateaux et lors du débarquement.
  • Examen des conditions de travail et de sécurité des pêcheurs, notamment lors de la pose des DCP, de la pêche et du trajet vers les lieux de pêche.

La pêche aux DCP représente 30 % des débarquements en Martinique. Elle permet de réduire les distances parcourues et d’économiser le carburant, par rapport aux techniques de pêche à la traine, utilisées traditionnellement pour pêcher au large. En revanche, elle n’a pas suffisamment réduit la pression sur les ressources du plateau insulaire, qui sont très exploitées. En effet, moins de la moitié des bateaux pêchent uniquement sous les DCP, les autres diversifient leurs prises en exploitant également les espèces côtières. Par ailleurs, les outils de production utilisés par les pêcheurs ne sont pas adaptés pour l’exploitation des ressources du large. Ils nécessitent d’être repensés, pour permettre aux pêcheurs de s’éloigner de la côte en toute sécurité, améliorer le traitement et la conservation de leurs prises (respect des normes) et réduire la consommation de carburant.

Les poissons les plus pêchés près des DCP sont le marlin bleu, le thon à nageoires jaunes, les thunninis et la dorade coryphène. L’un des problèmes majeurs des DCP est la capture d’espèces fortement exploitées, dont les stocks sont peu importants, notamment les poissons à rostre. Plusieurs moyens sont proposés pour réduire leur proportion, comme l’utilisation d’appâts différents, le choix de techniques de pêche plus sélectives ou la prise en compte de la saisonnalité.

Des travaux doivent être poursuivis pour mettre au point des techniques de pêche sélectives et identifier les modèles économiques adaptés aux entreprises de pêche antillaises. Le projet recommande que les pêcheurs bénéficient d’un accompagnement technique de façon à profiter des progrès en matière de conception des DCP. Un renouvellement de la flottille est également à envisager.