Aqua Sana : lutter contre une bactérie tueuse de poissons

L’élevage du poisson Paraha peue (Platax orbicularis) s’est développé depuis une dizaine d’années en Polynésie française, où il est consommé. Mais depuis 2011, de fortes mortalités, pouvant atteindre 10 à 90 % des effectifs en cages de grossissement, ralentissent le développement de la filière. Une bactérie du genre Tenacibaculum a été identifiée comme responsable de la maladie. Ce pathogène est depuis quelques années responsable d’épidémies, qui touchent plusieurs espèces de poissons d’élevage au niveau mondial, comme le saumon d’Atlantique, le turbot, la sole ou le bar.

Le projet Aqua-Sana (Aquaculture et santé animale) : trouver des moyens de lutte contre la ténacibaculose sans recourir aux antibiotiques

Des modifications des conditions d’élevage ont été testées expérimentalement afin d’améliorer la résistance des poissons à la maladie. Ceci se fait via une amélioration de l’environnement microbiologique des bacs d’élevage et des protocoles d’alimentation, de l’éclosion des œufs jusqu’aux alevins. Une bactérie probiotique et l’utilisation d’un circuit d’élevage en eau recirculée, où l’eau est réinjectée dans l’élevage après traitement, semblent donner des résultats prometteurs. Des essais vaccinaux ont par ailleurs été développés mais sans succès à ce jour.

Améliorer la réponse immunitaire des poissons via les protocoles d'élevage, des vaccins ou la sélection

La maladie se développe peu après le transfert des alevins du bassin d’écloserie vers des cages dans les lagons. Le pathogène responsable a été identifié en 2014. La seule méthode actuellement disponible pour lutter contre la maladie est l’utilisation d’antibiotiques. Mais ceux-ci peuvent être dangereux pour l’environnement et la santé des consommateurs. Il y a aussi un risque que les bactéries deviennent résistantes aux antibiotiques. Les recherches explorent plusieurs pistes pour améliorer la réponse immunitaire des Platax, via les protocoles d’élevage ou l’utilisation de compléments alimentaires à activité antimicrobienne et/ou qui stimulent l’immunité. En perspective : l’amélioration des protocoles d’élevage existants, le développement de vaccins et la sélection de poissons naturellement résistants à la bactérie.

Des analyses génétiques pour identifier les bactéries et les gènes impliqués chez les poissons

Une dizaine de souches de bactéries responsables de la maladie ont pu être isolées. Les analyses génétiques ont montré que l’espèce Tenacibaculum maritimum était systématiquement associée à l’infection. Du côté des poissons, un ensemble de gènes impliqués dans la réaction de défense immunitaire contre Tenacibaculum a été identifié. Une bactérie, Pseudoalteromonas piscicida, donnée en complément alimentaire, a réussi à augmenter la résistance des Platax à la maladie. Enfin, trois vaccins ont été développés, mais les essais menés jusqu’à présent n’ont pas été concluants.

Pour suivre : continuer l'étude des bactéries et les tests de vaccins

Il reste à préciser la fréquence, la diversité et la structure de la population de bactéries pathogènes. Les tests des vaccins vont se poursuivre. Les propriétés de macroalgues tropicales sont également étudiées en collaboration avec l’université de Polynésie française, pour développer des traitements préventifs. Les conditions d’élevage optimales seront testées à l’échelle industrielle à l’écloserie Vaia. Enfin, un autre axe d’étude cherchera d’éventuelles  variabilités génétiques conférant aux poissons une sensibilité à la maladie plus ou moins importante.