Au labo ou à la maison, nos chercheurs restent sur le pont

En pleine tempête sanitaire, l’Ifremer maintient le cap pour assurer ses missions primordiales : mieux connaitre l’océan pour mieux le préserver. Comme le reste de la France, l'institut poursuit le déconfinement progressif de ses activités avec le retour d'un peu plus de 30 % des salariés dans les différentes implantations de l'Ifremer. Guidée par la prudence, cette reprise reste partielle, le télétravail s’affichant toujours comme la règle pour la très grande majorité de nos 1500 employés.

Quoiqu’il en soit, au labo ou à la maison, la science continue ! Découvrez comment nous réalisons des analyses du milieu marin pour observer la présence de corona virus dans l’océan, suivez le sillage de nos scientifiques qui traquent les efflorescences algales depuis l’espace ou qui participent à une campagne océanographique afin de surveiller l’activité sismique d’un volcan sous-marin à Mayotte, et ainsi garantir la sécurité de la population mahoraise.

Quant à la solidarité avec le monde médical, elle non plus ne fait pas de pause, nos équipes se mobilisent autour de bien belles initiatives : des salariés de l’Ifremer réalisent des tests de dépistage du COVID-19 au sein du laboratoire de l’Unité Mixte de Recherche IHPE, d’autres cousent des blouses pour les soignants…

  1. Une reprise ancrée dans la prudence
  2. La science continue d’avancer
  3. Front solidaire avec les soignants

1. Une reprise ancrée dans la prudence

Progressivité et prudence sont les maîtres-mots qui balisent le retour dans nos centres et stations d’une première vague de salariés de l’Ifremer. Traduction de cette philosophie, seuls 32 % des effectifs travaillent sur site, tandis que la majorité des employés poursuit son activité dans le cadre du télétravail.

La santé des salariés est la valeur cardinale qui guide l’élaboration des plans de reprise d’activité dans les 5 centres que compte l’Ifremer en métropole et en outremer.

Ces plans de reprise d’activité détaillent notamment toutes les préconisations mises en place en matière d’hygiène et de respect des distanciations sociales dans nos différentes implantations en fonction des spécificités de chaque centre.

Masques, gels hydro alcooliques, lingettes désinfectantes accompagnent le retour des salariés revenus sur sites tandis que des procédures spécifiques ont été établies pour réglementer la circulation à l’intérieur des locaux, l’accès à la restauration, les conditions de désinfection des bâtiments, les mesures qui encadrent l’organisation de réunions…

Dans cette période où par la force des choses, chacun est souvent amené à travailler de son côté, il est symbolique de souligner que ces plans sont le fruit d’une réflexion collective portée par la Direction générale, les Directeurs de centres, des départements scientifiques, des directions fonctionnelles et bien sûr des représentants du personnel.

Sont concernés par un retour sur site les personnels déjà identifiés dans le cadre des Plans de Continuité d’Activité (PCA) et dont les missions avaient été jugées nécessaires au bon fonctionnement de l’établissement. S’y adjoignent les personnes dont l’activité n’est pas « télétravaillable » ou qui éprouvent pour une raison ou une autre une difficulté importante à travailler à distance. De même, les équipes dont les projets sont placés comme prioritaires par les départements scientifiques ont également repris le chemin des labos.

Ce premier contingent de 20 % de salariés pourra être renforcé au fil de l’évolution sanitaire « Nous réévaluerons progressivement le taux de présence sur nos sites en fonction de la décroissance ou non de l’épidémie, indique le PDG de l’Ifremer, François Houllier. Pour l’heure, notre politique reste de favoriser le télétravail partout où c’est possible pour contribuer à limiter la circulation du virus dans l’intérêt bien compris de tous nos concitoyens ».

2. La science continue d’avancer

Qu’ils soient de retour au labo ou toujours chez eux, les scientifiques de l’Ifremer restent sur le pont pour faire avancer la recherche en sciences marines. Dans le contexte de turbulences soufflées par le SARS-CoV-2, nos chercheurs ne dérivent pas de leurs objectifs. La preuve par 4.

L’Ifremer piste la trace du SARS-CoV-2 dans l’eau

Comme des milliers de chercheurs dans le monde, les scientifiques de l’Ifremer participent à la traque du SARS-CoV-2 pour mieux en comprendre les mécanismes de dissémination. En spécialiste du milieu marin, l’Ifremer s’est penché en particulier sur la présence de SARS-CoV-2 dans les eaux usées et les eaux marines soumises aux apports des populations humaines. Un projet de recherche a été initié par le Laboratoire Santé, Environnement et Microbiologie (LSEM) du Centre Atlantique à Nantes (Soizick Le Guyader & Jean-Côme Piquet), appuyé pour les aspects opérationnels par le réseau des Laboratoires Environnement Ressources (LER) de l’institut.

Les premiers résultats de l’étude, démarrée la deuxième quinzaine d’avril, semblent encourageants. Aucune trace du génome de SARS-CoV-2 n’a été détecté dans les échantillons d’eau de mer prélevés, pas plus que dans les coquillages examinés.

Une seconde étude vient de confirmer l'absence du SARS-COV-2 dans les coquillages, alors que la présence du virus a été détectée dans des prélèvements d'eaux usées du Grand Ouest analysés par les équipes de l'institut. Les scientifiques prolongeront leurs recherches les prochains mois pour conforter ces premières conclusions.

→ En savoir plus sur la première étude

→ En savoir plus sur la seconde étude

Mayobs 13 : Un volcan surveillé comme le lait sur le feu

Malgré le contexte de crise sanitaire actuel, la surveillance du volcan sous-marin à Mayotte reste une priorité. C’est la raison pour laquelle la mission Mayobs 13 qui implique des scientifiques de l’Ifremer, de l’IPGP, du BRGM et du CNRS a été maintenue en dépit du confinement grâce à un bateau de la Marine Nationale et au strict respect d’une mesure de quatorzaine avant l’embarquement.  L’objectif : récupérer les données des sismomètres de fond de mer (OBS),  des informations capitales qui auraient été définitivement perdues au fond de l’eau du fait de la fin de vie imminente des batteries.

Sur le pont pour l’Ifremer : Emmanuel Rinnert chef de mission, Pierre Guyavarch et Mickaël Roudaut pour la mission embarquée, tous les trois de l'unité Géosciences Marines. Une seconde campagne réalisée à bord d’un bateau de la société Fugro, a permis de cartographier le fond de mer et d’imager la colonne d’eau afin d’identifier d’éventuelles nouvelles coulées volcaniques et d’émissions de fluides. Cette campagne a été téléopérée à distance depuis Brest, Paris et Orléans par les équipes en géosciences marines de l’Ifremer (Carla Scalabrin, Benoît Loubrieu et Delphine Pierre) avec le concours des équipes de la Direction de la Flotte Océanographique, de Genavir et de leurs homologues de l’IPGP et du BRGM.

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Les algues nuisibles traquées depuis l’espace

L’Ifremer ne relâche pas sa surveillance sur le littoral malgré les restrictions d'embarquement actuelles et même sans prendre la mer, ses scientifiques peuvent suivre la prolifération des algues nuisibles depuis l’espace grâce aux données des satellites. Alain Lefebvre, responsable du Laboratoire Environnement Ressources de Boulogne-sur-Mer nous raconte comment il a suivi jour après jour le développement d’un bloom de Phaeocystis globosa, une algue qui peut former sur l’eau une couche mousseuse pouvant atteindre jusqu’à 2 mètres. Et il ne s’agit pas d’une simple pollution visuelle ! Présente en trop grande abondance, elle contribue à l’appauvrissement en oxygène de l’eau et par ricochet appauvrit la vitalité de la faune marine.

 → De l’écume au satellite, décollez pour l’enquête spatiale très spéciale d’Alain Lefebvre

Flotte océanographique : À quai mais le réappareillage est en programmation !

Depuis le 16 mars, tous les navires de la Flotte Océanographique Française sont revenus progressivement à quai, mais se tiennent prêts à l’appareillage dès que la situation sanitaire le permettra. C’est l’Alis, navire semi-hauturier basé en Nouvelle-Calédonie qui, le premier, pourrait reprendre la mer, fin juin ou début juillet. Cette reprise, dans un territoire plus rapidement déconfiné que dans l’hexagone, se fera sous réserve de l’acheminement des officiers nécessaires à l’armement du bateau dans le respect des mesures de quarantaine en vigueur. Ne seront autorisées que les campagnes strictement programmées au départ et à l’arrivée en Nouvelle-Calédonie. Les campagnes Selamik, Seamounts, et Reefadapt devraient ainsi faire l’objet d’une reprogrammation. La première, portée par le CNRS, s’intéressera à la dynamique sédimentaire dans un lagon soumis à l’influence minière. Les deux autres menées par l’IRD se pencheront respectivement sur l’étude des monts sous-marins de Nouvelle-Calédonie et sur les coraux adaptés aux environnements stressés.

A contrario dans la zone Antilles-Guyane, les campagnes de l’Antéa sont annulées et décalées à 2021. Quant aux navires hauturiers et côtiers métropolitains, l’horizon ne sera probablement pas dégagé pour de futures campagnes avant septembre 2020 a minima. Patience donc avant de hisser de nouveau le pavillon de la Flotte sur les océans du monde…

→ Lire les décisions actées par le comité directeur de la Flotte

3. Front solidaire avec les soignants

Sensibilisés comme tous les Français au dévouement des soignants auprès des malades atteints du COVID-19, quelques belles initiatives de solidarité sont nées au sein de l’Ifremer ou ont reçu l’implication sans faille de ses salariés.

L’UMR IHPE réalise des tests COVID-19 pour l’hôpital de Perpignan

D’habitude ils ciblent plutôt les maladies des mollusques ou des parasitoses transmises à l’homme par des mollusques mais nécessité faisant loi une équipe de 9 volontaires (dont 2 salariés de l’Ifremer) prête main-forte à l’hôpital de Perpignan pour la réalisation de tests virologique COVID-19.

C’est le directeur de l’Unité Mixte de Recherche Guillaume Mitta (Université de Perpignan Via Domitia) qui a porté cette initiative « Nous avons été alerté dès le 15 mars par la direction de l’UPVD de la nécessité de développer des tests sur le département des Pyrénées-Orientales. En effet, le CHR de Perpignan n’avait une capacité que de 80 tests journaliers, ce qui était largement insuffisant pour faire face au besoin de ce bassin de population. Nous avons donc décidé de mettre nos locaux de Perpignan et nos équipements d’analyse (machines PCR en temps réel) à disposition en partenariat avec un consortium de laboratoires d’analyse médicale (Biopole66, Medilab, le Centre) piloté par Biopole66 et son président Benoit Marnet ». Le laboratoire a obtenu l’autorisation de l’Agence Régionale de Santé et de la Préfecture.

Une équipe de 9 volontaires de l’UMR se relaie deux jours par semaine. Pour l’Ifremer deux personnels sont impliqués : Yannick Gueguen et Julien de Lorgeril ; pour l’UPVD : David Duval, Benjamin Gourbal et Guillaume Mitta se sont investis et pour le CNRS, Erika Burioli, Jean-Michel Escoubas, Jean-François Allienne et Richard Galinier ont répondu présents.

Une fois toutes les précautions sanitaires prises et l’inactivation du virus effectuée via un chauffage dans un incubateur à 65°, l’équipe, habituée à réaliser des RT-PCR pour la détection de virus, est en terrain connu. Le diagnostic reste bien sûr posé par des médecins. Actuellement une moyenne de 300 tests est effectuée chaque jour avec une capacité qui peut monter jusqu’à 550 si besoin. « Nous sommes tous contents de nous impliquer au service de notre population en souffrance », expliquent Guillaume Mitta et Yannick Gueguen.

Nous sommes tous contents de nous impliquer pour notre population en souffrance.

« Au quotidien, nous sommes parfois dans l’abstraction de nos recherches, là on touche au contraire à du très concret. L’initiative met en lumière les compétences depuis longtemps reconnues de l'IHPE (notamment par l'Organisation Mondiale de la Santé) mais surtout la volonté et l’engagement de nos chercheurs ». Le laboratoire se distingue d’ailleurs comme le premier laboratoire régional de recherche, et l’un des rares en France, accrédité pour la réalisation de tests COVID.

→ En savoir plus sur l’Unité Interaction Hôtes Pathogènes Environnements

240 blouses cousues main pour le CHU de Brest

Les couturiers de l’Ifremer se sont donnés du fil à retorde pour livrer 240 blouses en quelques jours au CHU de Brest. Du cousu main fait avec le cœur…

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Mi-avril, l’hôpital de Brest lance un appel aux bonnes volontés sur les réseaux sociaux : ses équipes soignantes manquent cruellement de blouses et ont besoin de l’expertise de quelques adeptes du dé à coudre. Delphine Rousic, responsable de la section couture de l’Association Sportive et Culturelle de l’Ifremer et de Genavir, décide de relayer l’information auprès des autres passionnés de son groupe. Au final une bonne moitié de la section, soit 26 personnes, se porte volontaire. Parmi cette armada de petites mains : des débutants comme des couturiers chevronnés. « Les plus expérimentés ont réalisé un tuto pour aider les autres. La tâche n’est pas des plus aisée : il faut coudre les poignets sur les manches, assembler le tout, surfiler l'ensemble de la blouse, puis ajouter les velcros. Ça prend une bonne heure en moyenne et parfois plus suivant la pratique de chacun » estime Delphine. L’investissement en temps n’était pas négligeable, sachant que certains ont cousu jusqu’à 30 blouses...

Les plus expérimentés ont réalisé un tuto pour aider les autres.

« On a tous eu à cœur de bien remplir notre mission. Nous n’aurions peut-être pas eu la force d’agir individuellement mais l’enthousiasme du groupe a créé une belle émulation. » Quant à l’hôpital, avec un seul interlocuteur au bout du fil et 240 blouses réceptionnées, l’équation était avantageuse. Au besoin cette équipe très pointue sur les aiguilles pourra reprendre du service !